Détails complets sur le haut-parleur large bande
Pourquoi parler des unités de haut-parleur ? Simplement, car le son que vous entendez provient de l'unité. Peu importe la qualité de l'enceinte (ou son absence) et la perfection du filtre de croisement, sans une bonne unité, tout est vain. L'importance de l'unité est donc indéniable.
Alors, une unité médium, ni haute ni basse, a-t-elle un intérêt ? Mais beaucoup disent que les médiums sont la plage de fréquences la plus importante pour la reproduction sonore, ce que j'approuve totalement. Si vous avez déjà été aussi ennuyé que moi, essayant d'écouter la chanteuse Cai Qin avec une seule unité d'aigu ou le violon de Paganini avec une seule unité de grave, vous comprendriez profondément la valeur d'une unité médium. Je pense que vous conviendrez aussi que si vous étiez forcé de n'utiliser qu'une seule unité pour écouter de la musique, vous choisiriez quelque chose qui ressemble à une unité médium. La raison est simple : vous savez (ou supposez) qu'elle couvrira les fréquences médium, là où l'audition humaine est la plus sensible et où réside l'essentiel de la structure musicale.
Conception de l'unité médium
Le concept du haut-parleur aigu "Doigt Jiang" évoqué précédemment peut s'étendre aux médiums, car toute unité émissive peut être décomposée en membrane vibrante, suspension de la membrane et système d'entraînement. Cependant, en raison des différentes plages de fréquences, ces éléments ont évolué vers des tailles spécifiques au fil des ans. Leurs formes et matériaux varient considérablement, notamment les matériaux des membranes, qui ont connu une explosion d'innovations récentes. Examinons-les un par un :
Membrane en papier
C'est probablement le matériau le plus ancien. En simplifiant, une suspension de pâte à papier est versée dans un moule en forme de cône. La pâte se dépose, est extraite à l'épaisseur désirée, puis séchée et traitée pour former une membrane. La composition de la pâte (types de fibres, longueurs, charges) et les procédés de fabrication (séchage à l'air, pressage à chaud, etc.) sont des secrets commerciaux qui influencent directement les caractéristiques sonores (Note 1)...
(Note 1 : Un article de M. Hong Huaigong détaillant la fabrication des membranes en papier m'a impressionné par la complexité du sujet et son esprit de recherche. Mes quelques lignes ici ne rendent pas justice au savoir accumulé par les pionniers.)
Généralement, les membranes en papier offrent un son naturel, clair et dynamique sans nervosité. Le réseau de fibres absorbe rapidement l'énergie, fournissant un bon amortissement. Les résonances de fractionnement en haute fréquence sont atténuées, permettant un déclin progressif. Cette caractéristique permet l'utilisation de filtres de croisement simples sans correction supplémentaire. De plus, la rigidité du papier est excellente pour la réponse transitoire et la restitution des détails. Contrairement aux apparences, le papier peut être très rigide avec une forme et une épaisseur adaptées. Bien conçues, ces membranes sont légères (15% de moins que les plastiques). Bien que légèrement plus lourdes que les fibres synthétiques, la différence est minime, d'où un haut rendement. L'unité médium PR170 de 6,5" d'Audax atteint 100 dB/W.
La faiblesse potentielle est la sensibilité à l'humidité, altérant densité et rigidité. Certains membres du club Lowther britannique affirment même que leurs enceintes sonnent mieux les jours de pluie !
Les cycles humidité/sécheresse pourraient causer une fatigue du matériau, mais de nombreuses unités anciennes fonctionnent parfaitement après des décennies. Ce changement est progressif, comme un vieillissement vers un nouvel état stable, sans problème majeur.
Les unités modernes améliorent la stabilité via des revêtements de surface ou des formulations spéciales (certaines sont étanches). Bien sûr, ces procédés restent souvent opaques. N'associez pas l'historique du papier à l'obsolescence. Dans l'industrie audio, les membranes coniques en papier dominent largement. Regardez votre TV, radio, chaîne hi-fi ou PC : la plupart utilisent de petits haut-parleurs en papier ! Certes, ils ne rivalisent pas avec le haut de gamme, mais les alternatives seraient pires et plus chères. Le papier, mature et rentable, équipe aussi des légendes : WE/Altec 755A, Goodmans Axiom 80, Altec A5/A7, AR 3a, Lowther, TAD... Des puristes déclarent : "Donnez-moi du papier, rien d'autre !" Beaucoup considèrent sa fabrication comme un art autant qu'une science.
Membrane plastique
L'omniprésence des plastiques, grâce à la pétrochimie, et leur faible coût les rendent attractifs pour l'audio, notamment le polypropylène (PP) moulé par injection.
Le PP est très résistant (boîtes micro-ondes, sangles d'emballage). Comme le papier, ses polymères absorbent bien l'énergie mécanique, assurant un déclin progressif en haute fréquence et permettant des filtres simples. Les petites enceintes 2 voies européennes (comme ProAc avec ses unités SCAN de 6,5" en PP transparent) en témoignent.
Cependant, le PP manque de rigidité et est relativement lourd. Cela entraîne un "fractionnement du cône" en haute fréquence : l'énergie de la bobine mobile n'est pas transmise uniformément à toute la membrane. Malgré un bon amortissement, le mouvement de piston est imparfait, augmentant la distorsion. Le son devient trop doux au détriment de la précision et du dynamisme, surtout avec des unités de 8" en 2 voies. Utiliser des unités plus petites atténue le problème, car la rigidité nécessite plus d'épaisseur (donc de masse) sur de grandes surfaces. Aucune enceinte à haut rendement n'utilise de membrane PP.
Contrairement au papier, le PP est sensible à la température, mais ce changement est lent. Malgré rigidité et masse limitées, des compromis permettent des produits réussis (ex: Scan). Des améliorations existent : ajouter des additifs au PP renforce la rigidité (Dynaudio, Infinity/Genesis). D'autres plastiques apparaissent (Bextrene, TPX, Neoflex), offrant meilleure rigidité et dynamisme.
Membrane métallique
La haute rigidité des métaux (aluminium, alliages) promet faible distorsion et bonne résolution. Mais la faible perte interne entraîne des pics de résonance nets en haute fréquence ("son métallique").
Le traitement implique :
1. Un filtre de croisement (pente raide d'au moins 12 dB/octave) supprimant la fréquence de résonance.
2. Renforcer l'amortissement : structures sandwich ou revêtements (Elac, Ensemble).
Le poids est un autre inconvénient. Les unités médium/grave métalliques sont peu efficaces et demandent de la puissance.
Fibres synthétiques
Les matériaux aérospatiaux (fibres de bore/carbone, structures sandwich nid d'abeille) allient légèreté et rigidité (plus que l'acier !). Les fabricants (Kevlar, carbone) vantent rigidité, faible masse et amortissement. Les deux premiers avantages sont réels, l'amortissement dépend des conditions.
(Note 2 : Cela concerne les meilleurs résultats en conception, pas la dureté absolue.)
Sans traitement, ces fibres rigides souffrent de résonances de fractionnement en HF, rendant le son dur voire agressif. Avec un bon amortissement et un filtrage adapté, elles offrent excellente résolution, réponse transitoire, dynamique et rendement (ex: Focal Audiom 7K à 98 dB/W).
(Note 3 : Comparaison Focal/Audax : malgré un aimant plus gros et une masse mobile plus faible, le rendement du Focal est inférieur, montrant l'importance d'autres facteurs.)
Audax a lancé le HAD (High Definition Aerogel), un gel de polymère acrylique et fibres synthétiques. Ses mesures montrent une réponse transitoire exceptionnelle, une très faible distorsion et un déclin progressif sans pics (rendement inférieur mais conception remarquable, utilisé par Swans dans l'Allure).
(Note 4 : Procédé unique : le gel rétrécit à 10% de son volume initial. Les molécules s'alignent sur les fibres, permettant un contrôle directionnel pour une rigidité et un auto-amortissement optimaux.)
Autres matériaux
Beaucoup d'autres matériaux sont utilisés : fibre de verre, celluloïd, graphite, bakélite, soie, polystyrène expansé, mousses plastiques, céramique frittée... Chacun a ses forces (aigus, médiums, graves). Une curiosité japonaise : des membranes "cultivées" à partir de moisissures sur un moule, réputées pour leur son ultra-naturel, mais coûteuses et difficiles à produire.
(Méfiance : certaines membranes masquent leur vrai matériau !)
Système magnétique
Après les membranes, examinons le système magnétique. M. Chen Yunshuang ayant couvert les aimants, concentrons-nous sur la conception globale, incluant la bobine mobile.
Le mouvement de la membrane est généré par l'interaction entre le courant dans la bobine et le champ magnétique fixe. La conception de la bobine et de l'entrefer est cruciale.
Bobine mobile
C'est une bobine de fil émaillé collée sur un cylindre. Le fil (cuivre, aluminium, argent, alliages) a souvent une section rectangulaire ou hexagonale pour maximiser le nombre de spires (donc la force magnétique et l'accélération de la membrane). Une bobine plate offre jusqu'à 30% d'accélération en plus.
(Note 5 : La "longueur" de la bobine est sa dimension axiale, pas la longueur déroulée du fil.)
La pression d'enroulement est énorme (tonnes !). Le cylindre doit être solide et résistant à la chaleur (aluminium, Kapton). Des traitements thermiques améliorent la stabilité (Klipsch cite des bobines survivant à une surchauffe extrême).
La taille de la bobine est un compromis : une grande bobine longue offre force et dynamique, mais augmente masse et inductance, nuisant aux transitoires et aux aigus. Une bobine partiellement dans l'entrefer réduit le contrôle et augmente la distorsion. Une petite bobine est légère mais manque de force et de puissance admissible. L'optimisation dépend de la membrane et de la force magnétique.
Aimant et circuit magnétique
Traditionnellement, les aimants sont polarisés axialement. L'entrefer concentre les lignes de champ radiales nécessaires à la bobine. La plupart utilisent des aimants céramiques (ferrite) : stables, résistants à la démagnétisation, peu chers, mais volumineux pour une forte induction.
Les unités médium de 6-7" peuvent avoir des aimants aussi larges que la membrane, voire plus pour les aigus ou les graves professionnels.
Une forte induction est souhaitable (rendement, dynamique, contrôle), mais les gros aimants perturbent l'onde arrière, causant réflexions et distorsions. Un traitement du baffle (ex: Theil) ou un baffle mince en métal atténue ce problème.
Le cadre (châssis) influence aussi : les anciens cadres en tôle estampée, larges et proches de la membrane, augmentent les réflexions. Les cadres en aluminium moulé offrent meilleure forme, solidité et réduction des colorations.
Des aimants puissants et compacts (Néodyme, NdFeB) libèrent l'onde arrière (ex: Vendersteen avec Vifa, Wilson Benesch Bishop). Lowther optimise aussi la forme de l'aimant et du cadre.
L'interaction bobine/aimant pose deux problèmes :
1. La bobine peut démagnétiser l'aimant. Les aimants Alnico résistent bien et contribuent à une sonorité agréable dans les médiums/aigus.
2. Le champ de la bobine module le champ fixe, causant de la distorsion. Des pôles cuivrés ou des bagues de court-circuit en cuivre réduisent fortement cette distorsion, surtout l'intermodulation dans les médium-graves.
Polarisation radiale : Innovation
Traditionnellement polarisés axialement, les aimants nécessitent une conversion en champ radial. Une polarisation radiale directe, complexe et coûteuse, est apparue il y a ~5 ans.
Les limites de l'axial : volume important, difficulté à obtenir un entrefer long avec une induction élevée. Un entrefer étroit complique l'assemblage. Un entrefer long avec une bobine courte réduit l'induction et le rendement, malgré une meilleure linéarité en puissance. Réussir les deux (ex: Altec 515, TAD 160X) est exceptionnel.
La polarisation radiale permet plus facilement un entrefer long à haute induction, offrant une course linéaire multipliée et une très faible distorsion à fort niveau. Idéal pour les graves (ex: Aura Sound 1808 professionnel 18").
Aucune unité médium radiale n'existe encore, mais son potentiel (compacité, puissance) est fort. Des prototypes doivent exister.
Vers le haut-parleur large bande
Pourquoi autant parler des médiums pour le large bande ? Parce que les défis du full-range sont nombreux. Un haut-parleur idéal doit avoir :
1. Faible distorsion
2. Bonne linéarité en puissance
3. Haut rendement
4. Large bande passante
Pousser le point 4 à l'extrême donne le large bande. Le prochain article abordera l'extension d'une unité médium vers le full-range, ses défis et les solutions ingénieuses des fabricants.
Problèmes d'extension vers le grave
Visuellement, une unité médium et une grave de taille similaire (6-7") se ressemblent (sauf la suspension plus souple de la grave). Peut-on transformer un médium en grave ? Oui, pour émettre des basses sans se soucier du niveau ou de la distorsion. La fréquence de résonance libre (fs) donne une indication de la limite basse.
Pour l'abaisser, on peut :
1. Augmenter la masse mobile : simple mais réduit rendement et extension dans l'aigu. Mauvaise solution.
2. Réduire l'amortissement :
a) Amortissement mécanique (suspension) : L'assouplir abaisse fs, mais augmente les colorations dans les médiums. À faire avec modération.
b) Amortissement électrique (contrôle magnétique) : Une forte induction est bonne (rendement, distorsion) mais empêche d'abaisser fs. C'est un compromis difficile, aggravé par la nécessité d'une bonne extension dans l'aigu.
Problèmes d'extension vers l'aigu
Facteurs électriques : L'inductance de la bobine, accentuée par le noyau magnétique, atténue les aigus et cause de la distorsion (IMD). Des pôles cuivrés ou des bagues réduisent l'inductance et la distorsion, améliorant les aigus.
Facteurs mécaniques : Physique de base (F=ma). Reproduire 20 kHz nécessite une accélération énorme. Solutions :
1. Réduire la masse : Conflit avec l'extension grave.
2. Augmenter la force motrice :
a) Plus de spires : Augmente inductance et masse, nuit aux aigus. Compromis nécessaire ("petit est beau").
b) Induction magnétique plus forte : Nécessaire pour accélérer une membrane "lourde", mais renforce l'amortissement électrique (conflit avec les graves). Compenser par un assouplissement mécanique.
"Fractionnement mécanique" : Solution clé
Pour résoudre le conflit masse grave/aigu, le large bande utilise astucieusement le fractionnement du cône comme "filtrage mécanique" :
- En grave : Toute la membrane bouge.
- En aigu : Seule la partie centrale (plus légère) suit la bobine, la périphérie (plus lourde) "ne suit plus".
La masse effective varie donc avec la fréquence. Réaliser cela de manière contrôlée (éviter les vibrations parasites) est complexe, surtout avec un signal musical large et variable.
Problèmes d'intégration système
Même une seule unité pose des défis d'intégration : équilibre spectral et conception de l'enceinte.
La réponse en fréquence d'un haut-parleur est rarement linéaire (contrairement à un ampli) à cause des résonances mécaniques complexes (pics et creux). L'idéal est une courbe irrégulière mais douce. Un amortissement fort ou faible se traduit par une courbe montante ou descendante (son serré/clair ou ample/sombre).
Un large bande performant implique des compromis. Problèmes courants :
1. Bosse dans les médiums (colorations) : Utiliser un filtre encochée (notch) pour l'aplatir. Solution simple et efficace.
2. Déclin progressif dans l'aigu (manque de force/induction ou membrane trop grosse) : Ajouter une unité d'aigu, atténuée doucement (pente de 6 dB/oct) à partir de 16-18 kHz. Cela préserve la cohérence de phase et les avantages du large bande.
3. Déclin progressif dans le grave (amortissement fort, son clair mais sans poids) : Utiliser un chargement par pavillon ou une enceinte accordée pour augmenter le rendement grave.
Conception de l'enceinte
Pour limiter l'excursion (cause de distorsion IMD et Doppler), le bass-reflex est souvent préféré au clos. Il réduit l'excursion à la fréquence d'accord (30-50 Hz), augmentant rendement, puissance admissible et réduisant la distorsion.
La plaque ouverte (Open Baffle) offre une pureté maximale (ex: WE/Altec 755C), mais nécessite une grande surface (1m² min), a un faible rendement grave, une puissance limitée et une directivité complexe.
Le pavillon (en particulier bass-reflex arrière plié) peut parfaitement compenser un amortissement fort dans le grave, boostant le rendement. (Le sujet des pavillons mérite un article à part).
Présentation d'unités emblématiques
Jordan Watts : Membrane alu, suspension filaire spéciale. Son "Vase" (6") offre un son surprenamment complet et naturel dans une pièce moyenne, avec une légère coloration grave qui s'estompe à l'écoute. Rendement faible. Le modèle 2" est une référence en dynamique et clarté (limité en grave).
Diatone P-610 : Légendaire (6.5" papier, Alnico, 90 dB/W, 50 Hz). Raies de pressage contrôlant le fractionnement. Son équilibré, image précise, micro-dynamique exceptionnelle. Idéal avec ampli SET (2A3).
WE/Altec 755A/C : Mythique (8" papier). 755A (70Hz-13kHz/8W), 755C (40Hz-15kHz/15W). Raie concentrique pour le fractionnement. Son pur et dynamique en plaque ouverte avec SET (2A3/300B).
Goodmans Axiom 80 : Légende britannique (années 50-60). Cadre et suspension uniques (probablement Alnico). Spécifications impressionnantes (20Hz-20kHz/6W). Nécessite un pavillon arrière de qualité et un 2A3.
Lowther : Référence depuis +50 ans. Membrane papier blanc double cône fabriquée artisanalement à plat. Phase plug central ("champignon" ou nouveau design "OVNI"). Trois gammes magnétiques : Ferrite (entrée de gamme), Alnico (haut de gamme, PM-4A : B=2.4T, 22kHz), Néodyme (performance moderne). Nécessite généralement un pavillon arrière (course max 1mm). Son : Présence exceptionnelle, détails, dynamique. Courbe souvent relevée en médium-aigu, directivité restreinte. Appréciation très subjective (on adore ou on déteste). Clubs dédiés en Europe, USA, Japon.
Conclusion
Un haut-parleur large bande bien utilisé offre une musicalité incomparable : cohérence de phase parfaite, absence de filtre dégradant le signal, micro-dynamique subtile, image précise. Cependant, il ne convient pas aux niveaux extrêmes (rock à 120 dB, home cinéma) ou au karaoké. À volume modéré, avec une musique adaptée, il procure une émotion profonde où la musique elle-même prime sur le volume.
Alors, une unité médium, ni haute ni basse, a-t-elle un intérêt ? Mais beaucoup disent que les médiums sont la plage de fréquences la plus importante pour la reproduction sonore, ce que j'approuve totalement. Si vous avez déjà été aussi ennuyé que moi, essayant d'écouter la chanteuse Cai Qin avec une seule unité d'aigu ou le violon de Paganini avec une seule unité de grave, vous comprendriez profondément la valeur d'une unité médium. Je pense que vous conviendrez aussi que si vous étiez forcé de n'utiliser qu'une seule unité pour écouter de la musique, vous choisiriez quelque chose qui ressemble à une unité médium. La raison est simple : vous savez (ou supposez) qu'elle couvrira les fréquences médium, là où l'audition humaine est la plus sensible et où réside l'essentiel de la structure musicale.
Conception de l'unité médium
Le concept du haut-parleur aigu "Doigt Jiang" évoqué précédemment peut s'étendre aux médiums, car toute unité émissive peut être décomposée en membrane vibrante, suspension de la membrane et système d'entraînement. Cependant, en raison des différentes plages de fréquences, ces éléments ont évolué vers des tailles spécifiques au fil des ans. Leurs formes et matériaux varient considérablement, notamment les matériaux des membranes, qui ont connu une explosion d'innovations récentes. Examinons-les un par un :
Membrane en papier
C'est probablement le matériau le plus ancien. En simplifiant, une suspension de pâte à papier est versée dans un moule en forme de cône. La pâte se dépose, est extraite à l'épaisseur désirée, puis séchée et traitée pour former une membrane. La composition de la pâte (types de fibres, longueurs, charges) et les procédés de fabrication (séchage à l'air, pressage à chaud, etc.) sont des secrets commerciaux qui influencent directement les caractéristiques sonores (Note 1)...
(Note 1 : Un article de M. Hong Huaigong détaillant la fabrication des membranes en papier m'a impressionné par la complexité du sujet et son esprit de recherche. Mes quelques lignes ici ne rendent pas justice au savoir accumulé par les pionniers.)
Généralement, les membranes en papier offrent un son naturel, clair et dynamique sans nervosité. Le réseau de fibres absorbe rapidement l'énergie, fournissant un bon amortissement. Les résonances de fractionnement en haute fréquence sont atténuées, permettant un déclin progressif. Cette caractéristique permet l'utilisation de filtres de croisement simples sans correction supplémentaire. De plus, la rigidité du papier est excellente pour la réponse transitoire et la restitution des détails. Contrairement aux apparences, le papier peut être très rigide avec une forme et une épaisseur adaptées. Bien conçues, ces membranes sont légères (15% de moins que les plastiques). Bien que légèrement plus lourdes que les fibres synthétiques, la différence est minime, d'où un haut rendement. L'unité médium PR170 de 6,5" d'Audax atteint 100 dB/W.
La faiblesse potentielle est la sensibilité à l'humidité, altérant densité et rigidité. Certains membres du club Lowther britannique affirment même que leurs enceintes sonnent mieux les jours de pluie !
Les cycles humidité/sécheresse pourraient causer une fatigue du matériau, mais de nombreuses unités anciennes fonctionnent parfaitement après des décennies. Ce changement est progressif, comme un vieillissement vers un nouvel état stable, sans problème majeur.
Les unités modernes améliorent la stabilité via des revêtements de surface ou des formulations spéciales (certaines sont étanches). Bien sûr, ces procédés restent souvent opaques. N'associez pas l'historique du papier à l'obsolescence. Dans l'industrie audio, les membranes coniques en papier dominent largement. Regardez votre TV, radio, chaîne hi-fi ou PC : la plupart utilisent de petits haut-parleurs en papier ! Certes, ils ne rivalisent pas avec le haut de gamme, mais les alternatives seraient pires et plus chères. Le papier, mature et rentable, équipe aussi des légendes : WE/Altec 755A, Goodmans Axiom 80, Altec A5/A7, AR 3a, Lowther, TAD... Des puristes déclarent : "Donnez-moi du papier, rien d'autre !" Beaucoup considèrent sa fabrication comme un art autant qu'une science.
Membrane plastique
L'omniprésence des plastiques, grâce à la pétrochimie, et leur faible coût les rendent attractifs pour l'audio, notamment le polypropylène (PP) moulé par injection.
Le PP est très résistant (boîtes micro-ondes, sangles d'emballage). Comme le papier, ses polymères absorbent bien l'énergie mécanique, assurant un déclin progressif en haute fréquence et permettant des filtres simples. Les petites enceintes 2 voies européennes (comme ProAc avec ses unités SCAN de 6,5" en PP transparent) en témoignent.
Cependant, le PP manque de rigidité et est relativement lourd. Cela entraîne un "fractionnement du cône" en haute fréquence : l'énergie de la bobine mobile n'est pas transmise uniformément à toute la membrane. Malgré un bon amortissement, le mouvement de piston est imparfait, augmentant la distorsion. Le son devient trop doux au détriment de la précision et du dynamisme, surtout avec des unités de 8" en 2 voies. Utiliser des unités plus petites atténue le problème, car la rigidité nécessite plus d'épaisseur (donc de masse) sur de grandes surfaces. Aucune enceinte à haut rendement n'utilise de membrane PP.
Contrairement au papier, le PP est sensible à la température, mais ce changement est lent. Malgré rigidité et masse limitées, des compromis permettent des produits réussis (ex: Scan). Des améliorations existent : ajouter des additifs au PP renforce la rigidité (Dynaudio, Infinity/Genesis). D'autres plastiques apparaissent (Bextrene, TPX, Neoflex), offrant meilleure rigidité et dynamisme.
Membrane métallique
La haute rigidité des métaux (aluminium, alliages) promet faible distorsion et bonne résolution. Mais la faible perte interne entraîne des pics de résonance nets en haute fréquence ("son métallique").
Le traitement implique :
1. Un filtre de croisement (pente raide d'au moins 12 dB/octave) supprimant la fréquence de résonance.
2. Renforcer l'amortissement : structures sandwich ou revêtements (Elac, Ensemble).
Le poids est un autre inconvénient. Les unités médium/grave métalliques sont peu efficaces et demandent de la puissance.
Fibres synthétiques
Les matériaux aérospatiaux (fibres de bore/carbone, structures sandwich nid d'abeille) allient légèreté et rigidité (plus que l'acier !). Les fabricants (Kevlar, carbone) vantent rigidité, faible masse et amortissement. Les deux premiers avantages sont réels, l'amortissement dépend des conditions.
(Note 2 : Cela concerne les meilleurs résultats en conception, pas la dureté absolue.)
Sans traitement, ces fibres rigides souffrent de résonances de fractionnement en HF, rendant le son dur voire agressif. Avec un bon amortissement et un filtrage adapté, elles offrent excellente résolution, réponse transitoire, dynamique et rendement (ex: Focal Audiom 7K à 98 dB/W).
(Note 3 : Comparaison Focal/Audax : malgré un aimant plus gros et une masse mobile plus faible, le rendement du Focal est inférieur, montrant l'importance d'autres facteurs.)
Audax a lancé le HAD (High Definition Aerogel), un gel de polymère acrylique et fibres synthétiques. Ses mesures montrent une réponse transitoire exceptionnelle, une très faible distorsion et un déclin progressif sans pics (rendement inférieur mais conception remarquable, utilisé par Swans dans l'Allure).
(Note 4 : Procédé unique : le gel rétrécit à 10% de son volume initial. Les molécules s'alignent sur les fibres, permettant un contrôle directionnel pour une rigidité et un auto-amortissement optimaux.)
Autres matériaux
Beaucoup d'autres matériaux sont utilisés : fibre de verre, celluloïd, graphite, bakélite, soie, polystyrène expansé, mousses plastiques, céramique frittée... Chacun a ses forces (aigus, médiums, graves). Une curiosité japonaise : des membranes "cultivées" à partir de moisissures sur un moule, réputées pour leur son ultra-naturel, mais coûteuses et difficiles à produire.
(Méfiance : certaines membranes masquent leur vrai matériau !)
Système magnétique
Après les membranes, examinons le système magnétique. M. Chen Yunshuang ayant couvert les aimants, concentrons-nous sur la conception globale, incluant la bobine mobile.
Le mouvement de la membrane est généré par l'interaction entre le courant dans la bobine et le champ magnétique fixe. La conception de la bobine et de l'entrefer est cruciale.
Bobine mobile
C'est une bobine de fil émaillé collée sur un cylindre. Le fil (cuivre, aluminium, argent, alliages) a souvent une section rectangulaire ou hexagonale pour maximiser le nombre de spires (donc la force magnétique et l'accélération de la membrane). Une bobine plate offre jusqu'à 30% d'accélération en plus.
(Note 5 : La "longueur" de la bobine est sa dimension axiale, pas la longueur déroulée du fil.)
La pression d'enroulement est énorme (tonnes !). Le cylindre doit être solide et résistant à la chaleur (aluminium, Kapton). Des traitements thermiques améliorent la stabilité (Klipsch cite des bobines survivant à une surchauffe extrême).
La taille de la bobine est un compromis : une grande bobine longue offre force et dynamique, mais augmente masse et inductance, nuisant aux transitoires et aux aigus. Une bobine partiellement dans l'entrefer réduit le contrôle et augmente la distorsion. Une petite bobine est légère mais manque de force et de puissance admissible. L'optimisation dépend de la membrane et de la force magnétique.
Aimant et circuit magnétique
Traditionnellement, les aimants sont polarisés axialement. L'entrefer concentre les lignes de champ radiales nécessaires à la bobine. La plupart utilisent des aimants céramiques (ferrite) : stables, résistants à la démagnétisation, peu chers, mais volumineux pour une forte induction.
Les unités médium de 6-7" peuvent avoir des aimants aussi larges que la membrane, voire plus pour les aigus ou les graves professionnels.
Une forte induction est souhaitable (rendement, dynamique, contrôle), mais les gros aimants perturbent l'onde arrière, causant réflexions et distorsions. Un traitement du baffle (ex: Theil) ou un baffle mince en métal atténue ce problème.
Le cadre (châssis) influence aussi : les anciens cadres en tôle estampée, larges et proches de la membrane, augmentent les réflexions. Les cadres en aluminium moulé offrent meilleure forme, solidité et réduction des colorations.
Des aimants puissants et compacts (Néodyme, NdFeB) libèrent l'onde arrière (ex: Vendersteen avec Vifa, Wilson Benesch Bishop). Lowther optimise aussi la forme de l'aimant et du cadre.
L'interaction bobine/aimant pose deux problèmes :
1. La bobine peut démagnétiser l'aimant. Les aimants Alnico résistent bien et contribuent à une sonorité agréable dans les médiums/aigus.
2. Le champ de la bobine module le champ fixe, causant de la distorsion. Des pôles cuivrés ou des bagues de court-circuit en cuivre réduisent fortement cette distorsion, surtout l'intermodulation dans les médium-graves.
Polarisation radiale : Innovation
Traditionnellement polarisés axialement, les aimants nécessitent une conversion en champ radial. Une polarisation radiale directe, complexe et coûteuse, est apparue il y a ~5 ans.
Les limites de l'axial : volume important, difficulté à obtenir un entrefer long avec une induction élevée. Un entrefer étroit complique l'assemblage. Un entrefer long avec une bobine courte réduit l'induction et le rendement, malgré une meilleure linéarité en puissance. Réussir les deux (ex: Altec 515, TAD 160X) est exceptionnel.
La polarisation radiale permet plus facilement un entrefer long à haute induction, offrant une course linéaire multipliée et une très faible distorsion à fort niveau. Idéal pour les graves (ex: Aura Sound 1808 professionnel 18").
Aucune unité médium radiale n'existe encore, mais son potentiel (compacité, puissance) est fort. Des prototypes doivent exister.
Vers le haut-parleur large bande
Pourquoi autant parler des médiums pour le large bande ? Parce que les défis du full-range sont nombreux. Un haut-parleur idéal doit avoir :
1. Faible distorsion
2. Bonne linéarité en puissance
3. Haut rendement
4. Large bande passante
Pousser le point 4 à l'extrême donne le large bande. Le prochain article abordera l'extension d'une unité médium vers le full-range, ses défis et les solutions ingénieuses des fabricants.
Problèmes d'extension vers le grave
Visuellement, une unité médium et une grave de taille similaire (6-7") se ressemblent (sauf la suspension plus souple de la grave). Peut-on transformer un médium en grave ? Oui, pour émettre des basses sans se soucier du niveau ou de la distorsion. La fréquence de résonance libre (fs) donne une indication de la limite basse.
Pour l'abaisser, on peut :
1. Augmenter la masse mobile : simple mais réduit rendement et extension dans l'aigu. Mauvaise solution.
2. Réduire l'amortissement :
a) Amortissement mécanique (suspension) : L'assouplir abaisse fs, mais augmente les colorations dans les médiums. À faire avec modération.
b) Amortissement électrique (contrôle magnétique) : Une forte induction est bonne (rendement, distorsion) mais empêche d'abaisser fs. C'est un compromis difficile, aggravé par la nécessité d'une bonne extension dans l'aigu.
Problèmes d'extension vers l'aigu
Facteurs électriques : L'inductance de la bobine, accentuée par le noyau magnétique, atténue les aigus et cause de la distorsion (IMD). Des pôles cuivrés ou des bagues réduisent l'inductance et la distorsion, améliorant les aigus.
Facteurs mécaniques : Physique de base (F=ma). Reproduire 20 kHz nécessite une accélération énorme. Solutions :
1. Réduire la masse : Conflit avec l'extension grave.
2. Augmenter la force motrice :
a) Plus de spires : Augmente inductance et masse, nuit aux aigus. Compromis nécessaire ("petit est beau").
b) Induction magnétique plus forte : Nécessaire pour accélérer une membrane "lourde", mais renforce l'amortissement électrique (conflit avec les graves). Compenser par un assouplissement mécanique.
"Fractionnement mécanique" : Solution clé
Pour résoudre le conflit masse grave/aigu, le large bande utilise astucieusement le fractionnement du cône comme "filtrage mécanique" :
- En grave : Toute la membrane bouge.
- En aigu : Seule la partie centrale (plus légère) suit la bobine, la périphérie (plus lourde) "ne suit plus".
La masse effective varie donc avec la fréquence. Réaliser cela de manière contrôlée (éviter les vibrations parasites) est complexe, surtout avec un signal musical large et variable.
Problèmes d'intégration système
Même une seule unité pose des défis d'intégration : équilibre spectral et conception de l'enceinte.
La réponse en fréquence d'un haut-parleur est rarement linéaire (contrairement à un ampli) à cause des résonances mécaniques complexes (pics et creux). L'idéal est une courbe irrégulière mais douce. Un amortissement fort ou faible se traduit par une courbe montante ou descendante (son serré/clair ou ample/sombre).
Un large bande performant implique des compromis. Problèmes courants :
1. Bosse dans les médiums (colorations) : Utiliser un filtre encochée (notch) pour l'aplatir. Solution simple et efficace.
2. Déclin progressif dans l'aigu (manque de force/induction ou membrane trop grosse) : Ajouter une unité d'aigu, atténuée doucement (pente de 6 dB/oct) à partir de 16-18 kHz. Cela préserve la cohérence de phase et les avantages du large bande.
3. Déclin progressif dans le grave (amortissement fort, son clair mais sans poids) : Utiliser un chargement par pavillon ou une enceinte accordée pour augmenter le rendement grave.
Conception de l'enceinte
Pour limiter l'excursion (cause de distorsion IMD et Doppler), le bass-reflex est souvent préféré au clos. Il réduit l'excursion à la fréquence d'accord (30-50 Hz), augmentant rendement, puissance admissible et réduisant la distorsion.
La plaque ouverte (Open Baffle) offre une pureté maximale (ex: WE/Altec 755C), mais nécessite une grande surface (1m² min), a un faible rendement grave, une puissance limitée et une directivité complexe.
Le pavillon (en particulier bass-reflex arrière plié) peut parfaitement compenser un amortissement fort dans le grave, boostant le rendement. (Le sujet des pavillons mérite un article à part).
Présentation d'unités emblématiques
Jordan Watts : Membrane alu, suspension filaire spéciale. Son "Vase" (6") offre un son surprenamment complet et naturel dans une pièce moyenne, avec une légère coloration grave qui s'estompe à l'écoute. Rendement faible. Le modèle 2" est une référence en dynamique et clarté (limité en grave).
Diatone P-610 : Légendaire (6.5" papier, Alnico, 90 dB/W, 50 Hz). Raies de pressage contrôlant le fractionnement. Son équilibré, image précise, micro-dynamique exceptionnelle. Idéal avec ampli SET (2A3).
WE/Altec 755A/C : Mythique (8" papier). 755A (70Hz-13kHz/8W), 755C (40Hz-15kHz/15W). Raie concentrique pour le fractionnement. Son pur et dynamique en plaque ouverte avec SET (2A3/300B).
Goodmans Axiom 80 : Légende britannique (années 50-60). Cadre et suspension uniques (probablement Alnico). Spécifications impressionnantes (20Hz-20kHz/6W). Nécessite un pavillon arrière de qualité et un 2A3.
Lowther : Référence depuis +50 ans. Membrane papier blanc double cône fabriquée artisanalement à plat. Phase plug central ("champignon" ou nouveau design "OVNI"). Trois gammes magnétiques : Ferrite (entrée de gamme), Alnico (haut de gamme, PM-4A : B=2.4T, 22kHz), Néodyme (performance moderne). Nécessite généralement un pavillon arrière (course max 1mm). Son : Présence exceptionnelle, détails, dynamique. Courbe souvent relevée en médium-aigu, directivité restreinte. Appréciation très subjective (on adore ou on déteste). Clubs dédiés en Europe, USA, Japon.
Conclusion
Un haut-parleur large bande bien utilisé offre une musicalité incomparable : cohérence de phase parfaite, absence de filtre dégradant le signal, micro-dynamique subtile, image précise. Cependant, il ne convient pas aux niveaux extrêmes (rock à 120 dB, home cinéma) ou au karaoké. À volume modéré, avec une musique adaptée, il procure une émotion profonde où la musique elle-même prime sur le volume.